1) CLASSIFICATION ET SIGNIFICATION :
Famille : Formicidae
Sous-famille : Myrmicinae
Tribu : Attini
Genre : Acromyrmex
Espèce : Acromyrmex octospinosus
Taxonomiste et année de description : Reich, 1793 (sous le nom de Formica octospinosa).
Noms vernaculaires : “Fourmi coupe-feuille” ; ”Fourmi magnoc” ; ”Fourmi parasol” ou encore “fourmi champignonniste”.
Synonymes et anciens noms utilisés : De multiples taxons sont récemment tombés en synonymie avec Acromyrmex octospinosus, dont toutes ses anciennes sous-espèces ainsi qu’A. echinatior et A. volcanus (Mera-Rodríguez et al., 2025). Le taxon A. guentheri est également synonyme d’A.octospinosus.
Étymologie genre : Du grec ancien akron (ακρον), “sommet”, et mýrmix (μύρμηξ), “fourmi”, soit “fourmi de la cîme”.
Étymologie espèce : Du latin octo, “huit”, et spinosus, “épineux”, soit “à huit épines”.
2) MORPHOLOGIE ET IDENTIFICATION :
TAILLE OUVRIÈRES : 2,5 à 8,5 mm

TAILLE GYNE : 10 à 11 mm

TAILLE MÂLE : 8,5 à 9,5 mm

romain5371 (pseudo discord)
Morphisme : Polymorphe ; les variations de taille entre ouvrières sont très importantes.
Identification : La très grande variabilité d’Acromyrmex octospinosus en fonction des populations et sa large répartition compliquent l’identification, qui devra être faite au cas par cas en fonction des localités.
Description et particularités physiques : Acromyrmex octospinosus est une fourmi de couleur brune ou orangée, à la cuticule très rugueuse et au mesosoma surmonté de multiples épines. Son corps est couvert de courts poils noirs, raides et épars. Ses pattes sont longues et sa silhouette svelte, ce qui lui permet de fourrager agilement aussi bien au sol que dans la végétation. Elle porte en outre de puissantes et tranchantes mandibules, parfaitement adaptées dans la découpe des feuilles. Les minors sont beaucoup moins sculptées que les majors.
Les reines, bien plus robustes que les ouvrières, possèdent un mesosoma classiquement volumineux, plus gros que le gastre et ne portant que quatre courtes épines. Au repos, leur gastre rond est souvent subtilement replié sous leur corps.
La tête des mâles, très petite, contraste curieusement avec leur gastre particulièrement massif.
Acromyrmex by tunosemi on Sketchfab
3) BIOLOGIE :
Description du biotope : Acromyrmex octospinosus se rencontre dans les forêts tropicales, les prairies ou les zones perturbées telles que les cultures agricoles.

Nidification : Les nids sont souvent terricoles, ou plus rarement arboricoles, étant alors logés dans le terreau accumulé entre les branches. Le choix du site de nidification dépendrait des populations et du sol (les colonies pouvant de préférence y établir leur nid lorsqu’il est relativement sec, mais choisissant plutôt les arbres si le sol est régulièrement inondé). De larges chambres sont creusées, et le champignon, criblé de cavités et faisant ainsi office de galeries, y est cultivé.

Démographie : Les colonies matures atteignent environ 40 000 ouvrières.
Particularités comportementales : Cette espèce vit en symbiose avec un champignon de l’espèce Leucoagarycus gongylophorus ; celui-ci sert à la colonie de nourriture et de nid, et, en retour, les fourmis le cultivent et le protègent. Les tâches internes au nid, notamment la culture du champignon et le soin du couvain, sont avant tout réalisées par les minors, là où seules les médias et les majors fourragent. Elles mobilisent de grands recrutements sur les feuilles de diverses plantes, qu’elles découpent afin de les ramener au nid.
Avant de soigner le champignon, ces fourmis nettoient systématiquement leurs pattes et la nourriture qu’elles y déposent ; en effet, leur jardin est très sensible aux infections de champignons parasites. Dans le même but, les ouvrières portent des bactéries bénéfiques, faisant office d’antibiotiques.
La grande quantité de végétation découpée par les colonies fait de cette espèce une ravageuse de cultures agricoles, et elle est ainsi souvent considérée comme nuisible là où elle est présente.
Une des populations anciennement connues sous le nom d’Acromyrmex echinatior est parasitée par l’espèce inquiline Acromyrmex insinuator.
Alimentation : Acromyrmex octospinosus découpe le feuillage des plantes vivantes, mais ne s’en nourrit pas directement ; ces végétaux servent de substrat au champignon qu’elles cultivent, qui, en retour, produit des gongylidia, des excroissances servant de nourriture à toute la colonie.

Essaimage : Les essaimages se font aux périodes pluvieuses de l’année, selon les régions et le climat. Ils se déroulent selon le male agregation syndrom : les mâles forment un essaim aérien, dans lequel les gynes volent ensuite afin de s’envoler. L’accouplement est susceptible d’être fortement polyandre, les reines pouvant s’accoupler avec jusqu’à 10 mâles.
Gynie : Cette espèce est le plus souvent monogyne, bien que certaines populations (celles anciennement nommées Acromyrmex echinatior) puissent être facultativement polygynes.
Fondation : Indépendante et semi-claustrale ; après l’essaimage, la reine s’aménage une loge dans le sol qu’elle quitte régulièrement afin de récolter des végétaux permettant d’initier la culture du champignon nourricier. Les spores de celui-ci sont récoltées dans le jardin de la colonie mère, et sont transportées dans la poche infrabuccale de la gyne. Le plus souvent, sa culture commence sur une petite racine débarrassée du substrat environnant. Le couvain de la première génération d’ouvrières est élevé dans ce petit jardin. La fondation s’effectue presque toujours en haplométrose.
Cycle de développement : En tant qu’espèce tropicale, Acromyrmex octospinosus est homodynamique ; elle ne fait donc pas de diapause, et se développe tout au long de l’année.
4) RÉPARTITION :
L’espèce s’étend largement du Mexique jusqu’au Brésil en passant par les Caraïbes. Elle est exotique en Guadeloupe et à Cuba.
5) ÉLEVAGE :
Température de maintien : 21,5 à 26 °C. Dépasser cette température cause des dommages au champignon, tandis qu’une température trop basse ralentit le développement de la colonie.
Une température optimale serait d’environ 23,5 °C.
Hygrométrie : L’hygrométrie ambiante dans la cuve du champignon doit être constamment d’environ 80-90 %, là où les cuves à déchets et l’aire de chasse pourront rester sèches.
Installation : L’espèce ne s’adapte pas du tout aux installations conventionnelles comme les nids en plexiglas, béton cellulaire ou autre composite. Ainsi, il faudra placer le champignon dans une cuve et lui offrir de préférence un substrat humide mais non détrempé (par exemple billes d’argile, humus, sable-limon, perlite …). Une astuce est de placer le champignon sur une plateforme en plastique ou en verre comme une coupelle elle-même posée sur le substrat, afin qu’il n’y ait aucun risque de surhumidité de contact.
De plus, il faudra ajouter une autre cuve à l’arrière de celle contenant le champignon afin qu’elles puissent y déposer les déchets. Autrement, les ouvrières déposeraient les déchets au pied du champignon, ce qui menacerait sa santé.
L’aire de chasse pourra être constituée d’une cuve supplémentaire. Veillez à ce que la barrière anti-évasion soit particulièrement efficace.
Les tuyaux de raccord, quant à eux, devront être d’un volume conséquent (et de préférence transparents afin de faciliter l’observation) ; à titre indicatif, un diamètre de 30 millimètres sera convenable afin de permettre un passage aisé aux ouvrières lorsqu’elles transporteront les feuilles.
Au fil du temps, avec la croissance de la colonie, il sera nécessaire d’ajouter de nouvelles cuves afin de suivre la croissance de la colonie et du champignon.
Attention : le champignon peut tolérer l’éclairage ambiant moyen, mais ne supporte pas les courants d’air.

mumujac#1990 (pseudo discord)
Foreuse ? : Oui ; cette espèce creuse notamment le plâtre et le béton cellulaire.
Diapause : Aucune diapause.
Fondation : Semi-claustrale ; des morceaux de feuilles devront être régulièrement fournis à la gyne au cours de la fondation, afin qu’elle puisse débuter la culture de son champignon et y élever sa première génération d’ouvrières.
Alimentation en élevage : La colonie se nourrira essentiellement, voir exclusivement du champignon, qui nécessitera quant à lui un apport important en végétaux. Certains aliments semblent être davantage appréciés, comme le troène, le lilas ou le rosier, mais ce sera fonction des goûts de votre colonie ; n’hésitez pas à faire des tests afin de cerner ses préférences.


Détails à ajouter : Les grandes colonies que constitue cette espèce, dont la croissance peut en outre se révéler très rapide, demanderont de déployer des moyens conséquents, que ce soit afin de leur consacrer la place nécessaire, leur fournir une quantité de végétation suffisante pour les rassasier ou satisfaire leurs exigences en termes de température. De plus, leur entretien se révélera particulièrement chronophage à terme. Cependant, au contraire de leurs cousines du genre Atta (qui constituent des colonies plus de 100 fois plus peuplées), le maintien d’Acromyrmex octospinosus sur le long terme jusqu’à la stabilisation de la colonie mature sera possible pour un particulier, malgré toutes les contraintes qui y sont associées.
Difficulté d’élevage : Difficile. Cette espèce tolère très mal les écarts de paramètres d’élevage (une température excessive, par exemple, pouvant très rapidement mener au déclin du champignon), ce qui, couplé à ses exigences particulières et à la grande taille des colonies matures, en fera une fourmi difficile à faire prospérer et à assumer sur le long terme.
Sources et Crédits :
Publications myrmécologiques :
- Barke, J.; Seipke, R.F.; Grüschow, S.; Heavens, D.; Drou, N.; Bibb, M.J.; Goss, R.J.; Yu, D.W.; Hutchings, M.I. 2010. A mixed community of actinomycetes produce multiple antibiotics for the fungus farming ant Acromyrmex octospinosus. BMC Biol. 2010 Aug 26;8:109. doi: 10.1186/1741-7007-8-109. PMID: 20796277; PMCID: PMC2942817.
(https://link.springer.com/content/pdf/10.1186/1741-7007-8-109.pdf) - Cantone, S. 2017. Winged ants – The male. Dichotomous key to genera of winged male ants in the world. Behavioral ecology of mating flight. São Paulo: Autopubblicato, 318 pp (https://www.antcat.org/references/143115)
- Dalla Torre, K. W. 1893. Catalogus Hymenopterorum hucusque descriptorum systematicus et synonymicus. Vol. 7. Formicidae (Heterogyna). Leipzig: W. Engelmann, 289 pp (https://www.antcat.org/references/124002)
- Fernández-Marín, H.; Zimmermann, J.; Wcislo, W. 2003. Nest-founding in Acromyrmex octospinosus (Hymenoptera, Formicidae, Attini): Demography and putative prophylactic behaviors. Insectes Sociaux. 50. 304-308. 10.1007/s00040-003-0687-z.(https://www.researchgate.net/publication/225745701_Nestfounding_in_Acromyrmex_octospinosus_Hymenoptera_Formicidae_Attini_Demography_and_putative_prophylactic_behaviors)
- Forel, A. 1893. Note sur les Attini. Annales de la Société Entomologique de Belgique 37:586-607. (https://www.antcat.org/references/125055)
- Mera-Rodríguez, D.; Fernández-Marín, H.; Rabeling, C. 2025. Phylogenomic approach to integrative taxonomy resolves a century-old taxonomic puzzle and the evolutionary history of the Acromyrmex octospinosus species complex. Systematic Entomology 50:1-26. 10.1111/syen.12665 (https://www.antcat.org/references/144433)
- Quinlan, R.J.; Cherrett, J.M. 1978. Studies on the role of the infrabuccal pocket of the leaf-cutting antAcromyrmex octospinosus (Reich) (Hym., Formicidae). Ins. Soc 25, 237–245. https://doi.org/10.1007/BF02224744 (https://link.springer.com/article/10.1007/BF02224744)
- Wetterer, J. 1995. Forager Size and Ecology of Acromyrmex coronatus and Other Leaf-Cutting Ants in Costa Rica. Oecologia, Vol. 104, No. 4, pp. 409-415 (https://www.jstor.org/stable/pdf/4221127.pdfcasa_token=Yqz3ytWwdfcAAAAA:P4KCnuyxcs23L4unTNSAtutCbwCkzMn1Lxp6mFsPEKJP8NpmzRsqNPMzkrPkOqUOLxVsP4T_LQTPfD6Qc9WJieurJn2tpiFJA9eR0yH9d3ZSE1LbL_U)
- Wetterer, J.; Daniel, G.; Jorgé, L. 1998. Foraging and Nesting Ecology of Acromyrmex octospinosus (Hymenoptera: Formicidae) in a Costa Rican Tropical Dry Forest The Florida Entomologist Mar., 1998, Vol. 81, No. 1, pp. 61-67. (https://www.jstor.org/stable/pdf/3495996.pdfcasa_token=kwbrBTZ8IXUAAAAA:uBqOGTjbur1kNSYo9imR0CdGxklPtyyy5UyBT3-P20GeF3KschVOFKWI9vxBeQ3TUPsB3Xcw8iTSDIhRT4pYW9FUQ-FL0jDQMBHqIRS0Ovnsdq14c)
Sources récurrentes :
- Antcat.org
- Antwiki.org
- Antmaps.org
- Antweb.org
- AntArea.fr
- Inaturalist.org
- Wiktionnaire (https://fr.wiktionary.org/wiki/Wiktionnaire:Page_d%E2%80%99accueil)