Le guide du débutant en maintien de fourmis

Introduction

Vous Ă©tiez assis lĂ , Ă  une table de pique-nique, sur une nappe ou sur un banc, quand vous l’avez vu : une petite fourmi qui est venue ramasser la miette que vous avez faite tomber. Elle l’a emmenĂ©e avec elle vers un nid que vous n’avez pas aperçu, cachĂ© quelque part au milieu des feuilles mortes.
L’Ă©tĂ© venu, vous Ă©tiez dehors en train de profiter d’un air plus frais, succĂ©dant aux orages survenus la veille. Puis vous les avez vu, ces dizaines de fourmis ailĂ©es prenant leur envol depuis la fenĂȘtre de votre maison. En rentrant chez vous, vous avez constatĂ© que, malgrĂ© l’effervescence au dehors, une partie de la colonie qui vit depuis quelques annĂ©es dans vos murs est toujours en train de chercher sous vos meubles quelques restes comestibles.
Les fourmis cĂŽtoient les humains depuis des milliers d’annĂ©es, et certaines sont aujourd’hui devenues familiĂšres de nos habitations et de nos villes. Pour les plus ruraux d’entre nous, une impressionnante diversitĂ© d’espĂšce peut s’observer sur des chemins de campagne, ou en forĂȘt. Comment, il n’y a pas que les « fourmis noires » et les « fourmis rouges » ? Et bien, la rĂ©alitĂ© est bien plus complexe et passionnante que cela !

Suite Ă  cette information, vous avez (nous en sommes convaincus) fait des recherches sur les fourmis et vous avez dĂ©couvert des genres aux noms Ă©tranges : « Camponotus », « Messor », « Formica », « Myrmica », « Temnothorax »,… Vous avez Ă©galement trouvĂ©s des sites Internet proposant Ă  la vente des « gynes » ou des « fondations », et vous vous ĂȘtes dit « Il est donc possible de maintenir une colonie de fourmis ? ». Nous vous rĂ©pondrons : Oui ! Il est tout Ă  fait envisageable de s’occuper d’une fourmiliĂšre et de la voir se dĂ©velopper au fil des annĂ©es, une fois quelques informations acquises. Nous vous prĂ©senterons dans ce guide les bases pour dĂ©buter sereinement dans la myrmĂ©cophilie.

Que cela soit par intĂ©rĂȘt pour ces insectes, dans un but pĂ©dagogique auprĂšs d’une Ă©cole ou d’une association, ou bien pour apporter un peu de couleur Ă  un quotidien morose, chacun choisira de maintenir des fourmis pour une raison personnelle. Dans un monde anthropisĂ©, oĂč le contact avec les animaux sauvages s’est perdu, avoir un bout d’authenticitĂ© chez sois permettra, nous l’espĂ©rons, de mieux comprendre les enjeux concernant la sauvegarde de la biodiversitĂ©.

Car on ne protĂšge que ce que l’on aime, on n’aime que ce que l’on connaĂźt, et on ne connaĂźt que ce que l’on voit, ce que l’on touche, ce que l’on ressent.

 

Ouvriùre de l’espùce Aphaenogaster subterranea. @L’Haricot.

Comment fonctionne ce guide ?

La page sur laquelle vous vous trouvez est un “guide principal” pour dĂ©couvrir, s’initier et comprendre le maintien de fourmis dans sa globalitĂ©. Vous pourrez ainsi commencer votre parcours sans difficultĂ© en suivant un “fil directeur” qui vous guidera ! Au cours de votre lecture, vous aurez accĂšs Ă  de nombreux liens de redirection pour visiter d’autres guides ou fiches d’élevage dans lesquels nous aborderons des thĂ©matiques plus prĂ©cises.

Chapitre I : Quelle espÚce pour débuter ?

 Généralités :

Les fourmis sont des insectes dit “sociaux”, elles se regroupent en colonies organisĂ©es et il n’existe donc pas de “fourmi solitaire” comme on pourrait l’observer chez les guĂȘpes ou les abeilles. La famille des Formicidae (= fourmis) est trĂšs diversifiĂ©e ; environ 14 500 espĂšces sont dĂ©crites, dont 220 prĂ©sentes en France, 80 en Belgique, 146 en Suisse et plus de 700 en Guyane française
 mais il en reste encore Ă  dĂ©couvrir.
Toutes les espĂšces prĂ©sentent des diffĂ©rences en terme de taille, de comportement, de couleur, de biologie, de rĂ©partition gĂ©ographique ; mĂȘme si parfois, seuls des dĂ©tails morphologiques infimes permettent de les diffĂ©rencier. Dans l’immense majoritĂ© des cas, une colonie s’organise autour de 3 types (ou castes) d’individus : les ouvriĂšres, la/les reine(s) et les mĂąles, bien qu’il existe des espĂšces avec des systĂšmes un peu plus complexes. SchĂ©matiquement, lors des vols reproducteurs (essaimages), survenant du printemps Ă  l’automne en France mĂ©tropolitaine, les futures reines (alors appelĂ©es princesses) se font fĂ©conder par des mĂąles issus d’autres colonies. Alors que ces derniers meurent aprĂšs l’accouplement, les princesses retombent sur le sol, s’arrachent les ailes et vont creuser une loge pour se cacher et pondre leurs premiers Ɠufs. Quelques semaines plus tard, les premiĂšres ouvriĂšres apparaĂźtront ; c’est le dĂ©but d’une nouvelle colonie. Au bout de quelques annĂ©es, la reine (ou gyne) va pondre des Ɠufs qui se dĂ©velopperont en nouvelles princesses ou mĂąles, qui s’envoleront Ă  leur tour afin de perpĂ©tuer l’espĂšce. Le cycle est ainsi bouclĂ©.

 

Comment choisir son espĂšce ?

VoilĂ  une question bien personnelle. Chacun trouvera des qualitĂ©s Ă  certaines espĂšces : le dĂ©butant sera souvent d’abord attirĂ© par la taille et la couleur d’une fourmis, tandis que la personne plus expĂ©rimentĂ©e prĂ©fĂ©rera observer des comportements inĂ©dits ou des interactions avec d’autres invertĂ©brĂ©s. Nous ne pouvons pas vous conseiller telle ou telle espĂšce, tant la diversitĂ© de celles-ci est importante. En revanche, nous vous prĂ©sentons des points Ă  considĂ©rer afin que vous puissiez vous-mĂȘme vous orienter.

  • La taille de la colonie Ă  long terme.

Il s’agit pour nous du facteur le plus important, trop souvent nĂ©gligĂ© lors de l’acquisition d’une fondation. En ce qui concerne les Lasius du groupe niger, les Messor, les Formica, les Pheidole, ainsi que d’autres espĂšces de mĂ©tropole et d’une multitude d’espĂšces exotiques, une colonie comportera au dĂ©part cinq ouvriĂšre, puis quinze, puis trente, on franchira ensuite le pallier des cents, voir des deux-cents ouvriĂšres d’ici la fin de la premiĂšre annĂ©e. La croissance sera ensuite exponentielle : on passera Ă  cinq cents ouvriĂšres, puis mille, deux milles, quatre milles, six milles… Il est difficile d’estimer la dĂ©mographie d’une colonie d’une espĂšce dite « populeuse » Ă  taille dĂ©finitive, c’est Ă  dire lorsque les pontes de la gyne ne font que compenser la mort naturelle des ouvriĂšres. Certaines estimations donnent « par dĂ©faut » dix milles individus, mais cela est probablement largement sous estimĂ© pour nombre d’espĂšces. Parlons plutĂŽt en terme de surface : une colonie mature de Lasius groupe niger peut occuper plusieurs mĂštres carrĂ©s en terme de nid, sans compter les aires de chasses associĂ©es. Une colonie de Formica sensu stricto peut nĂ©cessiter une salle entiĂšre d’installation, tandis que certaines espĂšces fourrageant sur plusieurs hectares dans la nature, comme les Atta cephalotes, ne sont tout simplement pas maintenables dans de bonnes conditions par des particuliers. Inversement, des genres rĂ©alisant des colonies de taille modeste (comme les Temnothorax, certaines Myrmica, certaines Lasius sp. jaune,…) seront plus abordables en terme de place et de gestion Ă  long terme.

  • La quantitĂ© de nourriture Ă  fournir

Ce point rejoint le prĂ©cĂ©dent, dans le sens oĂč une colonie de taille importante nĂ©cessitera une quantitĂ© de nourriture proportionnelle. Par exemple, des Pheidole pallidula ou de Polyrhachis dives ĂągĂ©es de seulement quelques annĂ©es consommeront avidement plusieurs abreuvoirs de liquide sucrĂ© et une dizaine de blattes par jour. Un Ă©levage nourricier consĂ©quent devra alors ĂȘtre prĂ©vu.

  • La longĂ©vitĂ© de la colonie

En rĂšgle gĂ©nĂ©ral, plus une espĂšce peut atteindre une dĂ©mographie importante, plus sa gyne est en mesure de vivre longtemps. Bien que certaines reines ne soient simplement pas capables de mener une colonie Ă  terme Ă  cause de problĂšmes propres Ă  l’individu (gĂ©nĂ©tique, rĂ©serves de nourriture trop faibles lors de l’essaimage, malformation, blessure…), la plupart de celles ayant survĂ©cu aux deux premiĂšres annĂ©es peuvent atteindre une dĂ©cennie, certaines peuvent mĂȘme dĂ©passer les vingts ans. A contrario, d’autres espĂšces Ă  la dĂ©mographie rĂ©duite ou effectuant des reproduction intra-nidale (c’est Ă  dire, se rĂ©alisant Ă  l’intĂ©rieur du nid entre individus apparentĂ©s, sans essaimages) ne vivent naturellement que quelques annĂ©es.

  • Le devenir de la colonie

Il est Ă©galement important de rĂ©flĂ©chir Ă  ce qu’une colonie peut vous apporter au bout d’un certain temps. Si l’émerveillement des dĂ©buts vous motive Ă  vous occuper au mieux de votre fondation, cela devient au bout d’un moment des tĂąches journaliĂšres rĂ©pĂ©titives : remplir les abreuvoirs, nourrir les proies et les distribuer, nettoyer les aires de chasse, crĂ©er une extension au nid,… Au final, bon nombre de personnes finissent par accumuler les espĂšces afin de pallier Ă  un dĂ©veloppement lent la premiĂšre annĂ©e, puis Ă  une lassitude ensuite. Et comme nous l’avons vu, avoir chez sois simultanĂ©ment des Lasius, Formica, Camponotus et d’autres espĂšces populeuses n’est Ă  terme gĂ©rable pour personne. Si vous souhaitez vous occuper de plusieurs colonies, dirigez-vous plutĂŽt vers des espĂšces Ă  la dĂ©mographie plus modeste. Vous pouvez aussi vous orientez sur des taxons susceptibles de se reproduire en captivitĂ© afin de rajouter une dimension supplĂ©mentaire Ă  votre passion, comme certaines Temnothorax, Aphaenogaster ou d’autres espĂšces plus atypiques.

Afin de ne pas bouleverser nos Ă©cosystĂšmes nous insistons sur le fait que vos fondations ou vos colonies ne doivent jamais ĂȘtre relĂąchĂ©es en nature, et ce mĂȘme si l’espĂšce est prĂ©sente dans votre rĂ©gion ou dans votre jardin. Les risques de pollution gĂ©nĂ©tique existent et afin de ne pas perturber les populations dĂ©jĂ  prĂ©sentes localement nous vous encourageons Ă  ne pas opter pour cette mĂ©thode qui puisse sembler louable au premier abord, mais ce n’est en rĂ©alitĂ© pas une bonne idĂ©e. Si vous ĂȘtes contraint de devoir vous sĂ©parer de vos fourmis il existe de nombreuses communautĂ©s oĂč vous trouverez des personnes qui pourront reprendre vos colonies, et mĂȘme parfois quelques organismes comme les musĂ©es pourraient ĂȘtre intĂ©ressĂ©s. 

Chapitre II : Récolte d'une gyne, identification et fondation

Trouver sa reine :

L’élĂ©ment essentiel pour commencer l’élevage sera de trouver une “gyne”. Il s’agit de l’individu le plus important, car c’est le seul Ă  pouvoir donner naissance Ă  des ouvriĂšres pour faire grandir la fondation.

Pour trouver cette reine, il vous faudra attendre la pĂ©riode des essaimages de l’espĂšce qui vous intĂ©resse. En Europe, ils ont gĂ©nĂ©ralement lieu entre avril et novembre, avec un pic entre juin et juillet. Ils surviennent souvent durant les journĂ©es chaudes, le lendemain d’une forte pluie (une haute hygromĂ©trie dans l’air est un facteur important pour provoquer l’essaimage chez un certain nombre d’espĂšces), et peuvent ĂȘtre plus ou moins discrets ou remarquables en fonction des genres.
Si vous vous trouvez dans une commune dans laquelle l’espĂšce que vous rechercher est prĂ©sente, vous trouverez sur le sol ou sur les arbres aux alentours des gynes ayant perdues leurs ailes (dites dĂ©sailĂ©es), et s’Ă©tant donc logiquement accouplĂ©es avec des mĂąles juste avant. Pour savoir si une espĂšce est prĂ©sente chez vous, n’hĂ©sitez pas Ă  consulter certains sites naturalistes participatifs, comme iNaturalist ou bien Antarea. Si vous ĂȘtes prĂ©sent(e) sur des forums de myrmecophilie, vous pouvez aussi demander Ă  des passionnĂ©s d’autres rĂ©gions de vous envoyer une gyne qu’ils auront rĂ©coltĂ©e. La plupart accepteront sans soucis, moyennant une prise en charge des frais du colis.

A noter que pour obtenir une gyne, il ne faudra pas dĂ©terrer de colonie dĂ©jĂ  Ă©tablie, ou prĂ©lever des sexuĂ©s de maniĂšre excessive. Cette pratique s’appelle le pillage, et est nĂ©faste pour les Ă©cosystĂšmes. Une colonie sauvage produira chaque annĂ©e des dizaines de princesses et de mĂąles. La plupart ne survivront pas, Ă©tant consommĂ©s par des oiseaux, mammifĂšres ou d’autres insectes. RĂ©colter une gyne Ă  cette occasion aura un impact environnemental nul, mais prĂ©lever directement la colonie mĂšre ou une part importante de ses individus reproducteurs privera l’Ă©cosystĂšme d’un maillon essentiel. Les fourmis sont Ă  la fois des prĂ©datrices d’invertĂ©brĂ©s, des charognardes, des animaux dispersant des graines et des proies pour d’autres ĂȘtres vivants.

 

PrĂ©mices d’un essaimage de Lasius sp. (mĂąles et ouvriĂšres) @Triturus.

Ceci Ă©tant dit, comment reconnaĂźtre Ă  coup sĂ»r la silhouette d’une gyne dĂ©sailĂ©e ? La taille sera gĂ©nĂ©ralement un bon indice, car les reines sont plus grandes que les ouvriĂšres d’une mĂȘme espĂšce. Elles possĂšdent aussi souvent un abdomen (gastre) plus volumineux.

Ces caractéristiques étant néanmoins variables en fonction des individus, il faudra surtout se référer aux critÚres suivants :

     

      • Un thorax volumineux, logeant les puissants muscles alaires nĂ©cessaires Ă  l’essaimage, qui serviront par la suite de rĂ©serves de nourriture durant la fondation.

      • Des cicatrices ailaires lĂ  oĂč les ailes Ă©taient prĂ©cĂ©demment attachĂ©es.

      • Des ocelles, trois petits yeux disposĂ©s en triangle sur le front. Attention nĂ©anmoins : les ouvriĂšres de certains genres, comme les Formica, ont Ă©galement des ocelles.

     

    Gyne Camponotus sp. d’Equateur. Photographie modifiĂ©e CC ; @Andreas Kay

     

    Princesses de Dolichoderus quadripunctatus accompagnĂ©es d’ouvriĂšres. Chez ces fourmis, le dimorphisme entre ces castes est peu marquĂ©. @Triturus.

     

    Lasius niger (fourmi noire des jardins) est une espÚce abondante en métropole. Photographie CC ; @AntPassionant

    L’identification :

    L’une des Ă©tapes les plus importantes aprĂšs l’obtention d’une gyne est de la faire identifier, ce afin d’ĂȘtre certain(e) du genre et de l’espĂšce Ă  laquelle elle appartient. L’identification de votre fourmi est primordiale, car chaque espĂšce a des besoins qui lui sont propres. L’identification prĂ©cise est parfois une tĂąche complexe, nĂ©cessitant de l’expĂ©rience ainsi qu’une mĂ©thode relativement pointue, c’est pourquoi nous ne dĂ©velopperons pas plus cette partie dans ce guide. Pour dĂ©couvrir les critĂšres permettant de connaĂźtre l’espĂšce de votre fourmi, nous vous invitons Ă  lire cette clĂ©. Nous vous conseillons Ă©galement de rejoindre un groupe de passionnĂ©s dans lequel vous pourrez demander une aide Ă  l’identification, aprĂšs avoir fourni quelques informations essentielles. Si vous avez achetĂ© votre gyne ou fondation auprĂšs d’une boutique, nous vous invitons fortement Ă  la faire rĂ©-identifier. La dĂ©termination minutieuse d’une espĂšce est parfois une Ă©tape nĂ©gligĂ©e par les vendeurs, il est donc rĂ©current de trouver de lĂ©gĂšres ou grossiĂšres erreurs dans l’appellation des fourmis provenant du commerce.

     

    Demande d’identification complĂšte et organisĂ©e, sur un groupe de passionnĂ©s. 
    (Ici, la fourmi est une Mystrium oberthueri) ; @One_Ants

     

    La fondation :

    Une fois la gyne identifiĂ©e, place Ă  l’étape la plus cruciale avant l’obtention d’une colonie : la fondation.
    Il s’agit du moment oĂč la gyne fraĂźchement fĂ©condĂ©e va creuser sa loge, puis commencer Ă  pondre et Ă©lever son couvain seule, jusqu’à la naissance de la premiĂšre gĂ©nĂ©ration d’ouvriĂšres.

    Il existe plusieurs types de fondation en fonction des espĂšces :

       

        • La fondation indĂ©pendante et claustrale : la gyne ne sort pas de sa loge et nourrit son couvain avec ses rĂ©serves jusqu’à l’arrivĂ©e des premiĂšres ouvriĂšres.

        • La fondation indĂ©pendante et semi-claustrale : la gyne sort rĂ©guliĂšrement de sa loge pour trouver de la nourriture dans le but d’alimenter son couvain, qu’elle Ă©lĂšve seule jusqu’à l’arrivĂ©e des premiĂšres ouvriĂšres.

        • La fondation dĂ©pendante : la gyne ne peut pas fonder seule. Elle part du nid, accompagnĂ©e d’ouvriĂšres de son espĂšce (bouturage ou fission coloniale), ou bien s’infiltre dans le nid d’une autre espĂšce (parasitisme social).

      Il existe Ă©galement une autre forme, appelĂ©e la fondation par plĂ©omĂ©trose. Il s’agit d’un mode de fondation dans lequel plusieurs gynes fĂ©condĂ©es vont joindre leurs efforts pour fonder une colonie. Cette fondation aboutira gĂ©nĂ©ralement sur une monogynie (une colonie ne comportant qu’une seule reine) car seule la gyne la plus robuste sera acceptĂ©e et Ă©pargnĂ©e par les ouvriĂšres au fur et Ă  mesure de l’avancĂ©e du dĂ©veloppement de la colonie. Chez certaines espĂšces, aucune reine n’est tuĂ©e. Il coexiste alors plusieurs gynes qui pondent ensembles au sein de la mĂȘme colonie, on appelle cela la polygynie ou l’oligogynie.
      En opposition, on nomme haplométrose le mode de fondation par lequel une gyne seule va fonder sa colonie sans aide extérieure (pour à la fin aboutir à une monogynie, ou adopter ultérieurement de nouvelles reines pour former une polygynie « secondaire »).
      Chaque espĂšce suit une forme de fondation qui lui est propre. En France mĂ©tropolitaine, la majoritĂ© des fourmis fonde de maniĂšre indĂ©pendante et claustrale en haplomĂ©trose (la gyne ne sort pas de sa loge et nourrit son couvain avec ses rĂ©serves jusqu’à l’arrivĂ©e des premiĂšres ouvriĂšres, elle n’est pas accompagnĂ©e par d’autres gynes de la mĂȘme espĂšce pour fonder).

       

      Gyne fondatrice de Manica rubida et ses premiÚres ouvriÚres. @Triturus

      Pour prĂ©parer une installation qui permettra Ă  la gyne de fonder, il vous faudra au prĂ©alable connaĂźtre son mode de fondation. Ainsi, nous vous conseillons de lire la fiche d’élevage de votre espĂšce ou de demander l’avis de passionnĂ©s plus expĂ©rimentĂ©s dans le but de maximiser vos chances de rĂ©ussite. La mĂ©thode la plus utilisĂ©e et la plus simple, adoptĂ©e par tous les Ă©leveurs depuis des annĂ©es, est celle du tube Ă  essai avec rĂ©serve d’eau. Polyvalent, facilement stockable et transportable, le tube Ă  essai sera un outil parfait qui permettra Ă  une gyne de se sentir comme dans sa galerie afin de la faire fonder.

      Prenez un tube Ă  essai de diamĂštre 15 Ă  20 mm, remplissez le tube d’eau minĂ©rale ou dĂ©minĂ©ralisĂ©e aux 2/3 puis insĂ©rez une boule de coton tassĂ©e et bien Ă©paisse jusqu’à atteindre l’eau, mettez la gyne dedans puis fermez le tube avec un autre morceau de coton, peu tassĂ©. Ensuite il vous suffira d’enrouler votre tube dans un papier d’aluminium (ou autre feuille opaque) pour que la gyne soit Ă  l’obscuritĂ©, et de poser ce tube dans un endroit calme Ă  l’abri de la lumiĂšre et des vibrations. Si l’espĂšce que vous avez choisi a un mode de fondation claustrale, le travail s’arrĂȘte ici : laissez le tube tranquille, ne nourrissez pas la fourmi durant cette pĂ©riode et ignorez lĂ  pendant 6/7 semaines. La fondation est parfois longue, il arrive Ă©galement que les gynes ne pondent qu’aprĂšs avoir rĂ©alisĂ© une diapause (“hibernation” chez les fourmis). Alors soyez patient, laissez votre reine tranquille et profitez de cette pĂ©riode pour prĂ©parer l’arrivĂ©e des premiĂšres ouvriĂšres. L’un des facteurs le plus important pour qu’une gyne puisse fonder est l’absence de stress.

       

      Tube Ă  essai prĂ©parĂ© afin d’accueillir une fondation. @One_Ants

      En revanche, si votre espĂšce a un mode de fondation semi-claustrale, vous allez devoir nourrir votre fourmi 2 Ă  3 fois par semaine avec du liquide sucrĂ© et des insectes morts durant la fondation. Il serait trĂšs stressant pour votre gyne de la nourrir directement dans le tube. Pour pallier Ă  ce problĂšme, les Ă©leveurs ont trouvĂ© une solution : relier le tube enroulĂ© dans de l’aluminium Ă  une aire de chasse (appelĂ©e « ADC »). Il s’agit une zone extĂ©rieure au nid dans laquelle la fourmi peut se balader librement en quĂȘte de nourriture. Nous vous conseillons dans ce cas de boucher partiellement l’entrĂ©e du tube avec du coton, et d’insĂ©rer une paille ou une tige vĂ©gĂ©tale creuse pour permettre Ă  la gyne de sortir, tout en conservant un tube relativement fermĂ©. Cela permettra de conserver l’humiditĂ© et les phĂ©romones de la reine Ă  l’intĂ©rieur.

       

      Tube Ă  essai dans une aire de chasse. @One_Ants

      Chapitre III : L’alimentation

      Avant d’envisager de prendre une colonie chez sois, il est essentiel de savoir ce que vos occupantes vont manger.

      Avant de rentrer dans le vif du sujet, il est important de faire un peu de vulgarisation. L’organisme des fourmis, comme chez l’homme, Ă  besoin de macronutriments, aussi connus sous le nom de glucides, lipides et protĂ©ines. Chacun d’entre eux a un rĂŽle bien prĂ©cis dans les cellules. Les glucides ont pour principal rĂŽle la production d’énergie, essentielle Ă  la vie active de nos fourmis. Les lipides sont les composants principaux de la membrane cellulaire, peuvent ĂȘtre Ă©galement utilisĂ©s pour la production d’Ă©nergie et possĂšdent un rĂŽle hormonal majeur chez les fourmis. Enfin, les protĂ©ines participent, entre autres, Ă  l’expression de l’ADN, l’activitĂ© enzymatique (exemple : venin des ponĂ©rines) et la composition cellulaire.
      Aux cÎtés des macronutriments, on retrouve les micronutriments ; ceux-ci sont nombreux, et regroupent les vitamines et sels minéraux essentiels à la vie cellulaire. Ils sont plus difficiles à quantifier dans la nutrition en élevage mais tout aussi nécessaires. Certaines espÚces en ont notamment besoin pour produire des sexués (A. Bhatkar, W. H. Whitcomb, 1970). Pour la plupart des espÚces, les glucides seront donnés sous forme de liquide sucré (parfois appelé miellat synthétique), tandis que les lipides, les protéines et les micronutriments proviendront des insectes.

       

      Ectatomma tuberculatum se nourrissant sur une gelée fruité. @One_Ants

      Le liquide sucré :

      Comment composer son liquide sucré ?

      En premier lieu, il faut choisir la base liquide de votre liquide sucrĂ© souvent abrĂ©gĂ© « LS » dans la communautĂ©. Le plus simple est l’eau minĂ©rale (prĂ©fĂ©rable Ă  l’eau du robinet pour son absence de chlore, et pour Ă©viter d’Ă©ventuels rĂ©sidus de pesticides). Il a parfois Ă©tĂ© conseillĂ© d’ajouter dans le pseudo-miellat des liquides protĂ©inĂ©s tels que le lait ; cette alternative est en rĂ©alitĂ© Ă  Ă©viter, car une fois ces nutriments mĂ©langĂ©s, les ouvriĂšres ne seront plus capables de les sĂ©parer elles-mĂȘmes. Or, ils ne sont pas destinĂ©s aux mĂȘmes individus dans la colonie (les aliments sucrĂ©s Ă©tant plutĂŽt consommĂ©s par les adultes, lĂ  oĂč les protĂ©ines et glucides reviendront avant tout aux larves et dans une moindre mesure aux reines). Leur distribution en un liquide unique pourrait d’ailleurs ĂȘtre susceptible de conduire Ă  des mortalitĂ©s prĂ©maturĂ©es chez les ouvriĂšres.  Il vaut mieux sĂ©parer les aliments sucrĂ©s et protĂ©inĂ©s pour laisser les fourmis dĂ©cider de prendre uniquement ce dont elles ont besoin.

      Dans un deuxiĂšme temps, on ajoutera une ou plusieurs substances sucrĂ©es, afin de les dissoudre dans votre base liquide. Vous pouvez utiliser du sucre blanc, du sucre roux, du sirop (agave, Ă©rable, coco, fruits divers…). Veillez cependant Ă  ce que vos produits soient bio. On essaiera d’avoir une concentration de sucre dans le « LS » Ă  hauteur de 10%. Enfin l’ajout de complĂ©ments en micronutriments sous forme de vitamines n’est pas obligatoire, mais cela peut ĂȘtre un plus.

      Certaines personnes choisissent d’acheter sur Internet des liquides sucrĂ©s prĂȘt Ă  l’emploi destinĂ©s aux fourmis. Ces liquides sont souvent efficaces mais onĂ©reux. Il semblerait que bon nombre des liquides sucrĂ©s vendu sur Internet soient en rĂ©alitĂ© des liquides destinĂ©es Ă  l’alimentation des abeilles, revendues dans un plus petit contenant.

       

      Lasius emarginatus s’abreuvant de liquide sucrĂ©. @One_Ants

      Comment distribuer le liquide sucré ?

      La plupart du temps, le liquide sucrĂ© sera mit Ă  disposition dans des abreuvoirs. A noter que l’ajout d’un abreuvoir contenant uniquement de l’eau est intĂ©ressant, il permettra aux fourmis de s’hydrater sans devoir forcĂ©ment absorber des glucides avec. Pour les plus petites espĂšces, il est conseillĂ© d’imbiber un coton de « LS » pour le nourrissage, afin d’Ă©viter les noyades, mais ce dernier sĂšchera en quelques heures. Dans la nature, les ouvriĂšres fourragent quotidiennement, leur donner accĂšs a une source de sucre en continue est donc nĂ©cessaire. Il faudra Ă©galement faire attention avec la plupart des abreuvoirs du commerce qui peuvent facilement fuiter sous l’effet de la fermentation du liquide sucrĂ©.

      Autres sources de glucides :

      • Les fruits

      À cĂŽtĂ© de votre liquide sucrĂ©, vous pouvez disposer dans l’air de chasse des fruits bien mĂ»rs. Ils sont riches en fructose (sucre naturel facilement assimilable par les fourmis), mais aussi en vitamines. Ils permettent Ă©galement d’observer un comportement naturel, les fourmis sauvages lĂ©chant souvent des fruits tombĂ©s au sol. Il faudra seulement veillez Ă  les prendre BIO, bien les laver et les Ă©plucher, la peau des fruits du commerce Ă©tant souvent recouverte de pesticides. Évitez aussi certains fruits acides, comme les agrumes. N’hĂ©sitez pas Ă  varier les fruits proposĂ©s, certains plairont plus que d’autres en fonction de l’espĂšce de vos fourmis.

      • Les Beetle Jelly et le Repashy

      Ce sont des gelĂ©es protĂ©inĂ©es commercialisĂ©es en terrariophilie afin de nourrir les colĂ©optĂšres adultes. Il existe diffĂ©rentes compositions et parfums, allant du sucre roux Ă  la banane. Elles ont l’avantage de pouvoir rester plusieurs jours sans sĂ©cher dans l’aire de chasse et de faire un apport complet Ă  vos fourmis en plus du liquide sucrĂ©, notamment en protĂ©ines. Cela peut ĂȘtre un bon compromis si vous vous absentez quelques temps de chez vous. Si vous deviez vous tournez vers un seul type de Beetle jelly, nous vous conseillerons celles spĂ©cialement conçues pour les scarabĂ©es japonais. Elles sont blanches, et bien que moins sucrĂ©es, possĂšdent un plus large spectre en acides aminĂ©s et vitamines. Elles sont utilisĂ©es au Japon pour l’élevage de dynastes et de lucanes, elles ont l’avantage de sĂ©cher bien moins vite que leurs concurrentes et d’ĂȘtre le meilleur compromis pour un apport occasionnel. Sinon, vous pouvez Ă©galement en faire vous-mĂȘme, en utilisant de l’agar-agar ou de la gĂ©latine comme gĂ©lifiant.
      Un autre produit Ă©galement utilisĂ© en terrariophilie et pouvant ĂȘtre utile en myrmĂ©cologie est le Repashy : une compote trĂšs riche et trĂšs sucrĂ©e pour reptiles frugivores, souvent apprĂ©ciĂ©e des fourmis.

       

      Remarque : 

      Il se peut que vous ne voyez pas vos fourmis se nourrir, mais cela ne signifie pas qu’elles ne le font pas. En effet, comme il n’y a au stade de fondation que peu d’ouvriĂšres et de couvain, leurs besoins en nourriture sont trĂšs faibles et leurs sorties dans l’aire de chasse ne sont que peu frĂ©quentes. Une solution trĂšs simple pour savoir si elles s’alimentent correctement est de repĂ©rer leur physogastrie. Il s’agit d’un Ă©tirement du gastre d’une fourmi pour stocker de la nourriture sous forme liquide, il se repĂšre grĂące Ă  des rayures translucides sur l’abdomen.

       

      Physogastrie chez une ouvriĂšre Prenolepis imparis : Photographie CC ; Jake Nitta

      Les protéines et lipides :

      Dans la nature, les fourmis sont opportunistes, c’est-Ă -dire que la moindre source de nourriture leur convient pour peu qu’elle demande peu d’effort individuel pour ĂȘtre rĂ©coltĂ©e. Elles jouent un rĂŽle majeur dans les Ă©cosystĂšmes en se nourrissant des cadavres d’insectes et animaux morts. Les protĂ©ines ainsi rĂ©coltĂ©es servent en grande partie Ă  nourrir les larves de la colonie afin de permettre leur dĂ©veloppement. Les biologistes estiment qu’il y a 7,7 millions d’espĂšces vivantes sur Terre dont des milliers seraient consommĂ©s par des fourmis, dresser prĂ©cisĂ©ment une “liste de courses” pour vos fourmis serait donc impossible. Il vous faudra vous tourner vers une espĂšce de nourriciers qui vous semblera facile Ă  Ă©lever.

      Point important : l’Ă©levage d’une espĂšce d’insecte qui servira de proie Ă  vos fourmis deviendra obligatoire avec le temps, que cela soit pour une raison budgĂ©taire ou de facilitĂ© d’approvisionnement (rappelons que certaines espĂšces consommerons plus d’une dizaine d’insecte de la taille de blattes par jour au bout de quelques annĂ©es). PrĂ©voyez d’amĂ©nager des caisses d’Ă©levage dĂšs la premiĂšre diapause.

       

      Manica rubida consommant une blatte. @Triturus

      Comment donnez des insectes Ă  mes fourmis ?

      Il est possible dans un premier temps d’aller chercher des insectes dans votre jardin, la grande majoritĂ© sera acceptĂ© par vos fourmis. Évitez seulement les insectes aux couleurs vives (souvent toxiques), les autres hymĂ©noptĂšres (guĂȘpes, abeilles, frelons,…pouvant ĂȘtre dans de rares cas porteurs de maladies transmissibles aux fourmis), et bien Ă©videmment les espĂšces protĂ©gĂ©es ou localement rares. Par principe de prĂ©caution, il peut ĂȘtre conseillĂ© de congeler 24 Ă  48 h tout animal extĂ©rieur afin d’éliminer le risque d’arrivĂ©e de parasites dans votre colonie, bien que cela soit excessivement rare et que certaines fourmis peuvent refuser les proies dĂ©congelĂ©es.

      Aujourd’hui, de nombreux insectes sont Ă©levĂ©s dans un but nourricier en terrariophilie et en alimentation humaine. On y retrouve des larves de colĂ©optĂšres comme Tenebrio molitor (“vers de farine”), Zophobas morio (“vers morio”), ou encore Pachnoda marginata (“Dolas”), des insectes chantants comme des grillons ou criquets, des insectes volants tels que des drosophiles ou des mouches, et des blattes comme les Shelfordella lateralis (“Red runner”), Blaptica dubia (“Blatte dubia”) ou encore Pycnoscelus sp. . Les insectes citĂ©s prĂ©cĂ©demment sont facilement trouvables en animalerie afin d’initier un Ă©levage nourricier Ă  destination de vos fourmis. Elles lĂšcheront d’abord l’hĂ©molymphe (Ă©quivalent du sang) contenu dans les insectes que vous leur donnerez, c’est pourquoi elles auront une prĂ©fĂ©rence pour les insectes fraĂźchement tuĂ©s.

      Pour ce faire, vous pouvez placer les insectes quelques secondes Ă  quelques minutes au congĂ©lateur (en fonction de leur taille) pour les faire entrer en lĂ©thargie. Ensuite, munissez vous d’une lame de rasoir ou d’un cuter aiguisĂ© ou des ciseaux et dĂ©capiter l’insecte pour le tuer. DĂ©coupez le ensuite en plusieurs morceaux si nĂ©cessaire, car certains insectes, comme les vers de farine, possĂšdent un exosquelette difficile Ă  percer pour les fourmis.

      Tableau récapitulatif des valeurs nutritives de plusieurs espÚces couramment utilisées comment source de nourriture.
      Par DMX (Myrmecofourmis.org)

      D’autres sources de protĂ©ines comme de l’Ɠuf ou de la viande pourront Ă©galement ĂȘtre proposĂ©es occasionnellement, mais veillez Ă  ce que ces aliments ne pourrissent pas dans l’aire de chasse. Veillez Ă©galement Ă  ce que ces produits soient non transformĂ©s, ils doivent ĂȘtre donner crus ou cuits sans additifs, le sel Ă©tant plus ou moins nocif pour nos fourmis il est prĂ©fĂ©rable d’Ă©viter tout aliment qui pourraient en contenir. 

       

      Le Bhaktar, un aliment artificiel qui peut dépanner :

      Si vous prĂ©voyez de vous absenter un moment de chez vous, vous pouvez créé vous mĂȘme une gelĂ©e sucrĂ©e et protĂ©inĂ©e appelĂ©e Bhaktar, d’aprĂšs la recette de A. Bhatkar, W. H. Whitcomb. Vous trouverez cette recette dans notre guide : prĂ©parer un dĂ©part en vacances pour ses fourmis

       

      Régimes alimentaires particuliers :

      Certaines espĂšces rencontrĂ©es en Ă©levage pourront avoir un rĂ©gime particulier : graines, feuilles, couvain d’autres fourmis, proies spĂ©cifiques
 Dans ces cas particuliers nous vous invitons Ă  consulter nos fiches d’élevages. Gardez cependant Ă  l’esprit que certains de ces rĂ©gimes pourraient ĂȘtre contraignants sur le long terme.
      Comme toujours, favorisez les circuits courts, les aliments peu transformés et les aliments BIO car ils contiennent moins de pesticides, nocifs pour les insectes et donc pour les fourmis.

       

      Messor barbarus, une fourmi granivore. Photographie CC ; @alvaro_alemany

      Chapitre IV : ParamĂštres Ă  observer, aire de chasse, mise en nid, et diapause

      Les paramĂštres importants :

      En plus d’une alimentation adaptĂ©e et Ă©quilibrĂ©e, chaque espĂšce de fourmi nĂ©cessite des conditions de maintien qui lui sont propres. Les principaux paramĂštres Ă  considĂ©rer sont :

      • L’hygromĂ©trie : la proportion d’eau contenue dans l’air de la fourmiliĂšre, ou la proportion de surface humidifiĂ©e dans le nid.
      • La tempĂ©rature : la chaleur interne et externe du nid.
      • La luminositĂ© : l’intensitĂ© lumineuse Ă  l’intĂ©rieur et Ă  l’extĂ©rieur du nid.

      HygromĂ©trie : 

      Toutes les fourmis ne vivent pas dans les mĂȘmes biotopes. Ainsi l’accĂšs Ă  l’eau sous forme liquide et gazeuse diffĂšre en fonction de l’environnement d’origine d’une espĂšce, et Ă  finit par conditionner la quantitĂ© d’eau nĂ©cessaire Ă  leur survie. Attention, les apparences peuvent ĂȘtre trompeuses, des fourmis vivants dans un environnement semblant sec peuvent demander une hygromĂ©trie importante car, sans que vous le remarquiez, le sol du milieu peut ĂȘtre humide Ă  une certaine profondeur. Ainsi nous vous conseillons de consulter nos fiches, ainsi que d’autres Ă©leveurs pour connaĂźtre les besoins de vos fourmis.

      L’hygromĂ©trie est quantifiĂ©e en pourcentage (taux d’eau sous forme gazeuse dans l’air par rapport au taux Ă  saturation) :

      • 100% L’air est saturĂ©e d’humiditĂ©.
      • 60% Ă  50% C’est le taux d’hygromĂ©trie normale dans une maison en Europe.
      • 20% C’est le taux d’hygromĂ©trie d’un nid sec chauffĂ© Ă  28°C.
      • 0% L’air est parfaitement sec.

      Les nids artificiels dans lesquels sont Ă©levĂ©es les fourmis possĂšdent normalement une ou plusieurs rĂ©serves dans lesquelles on peut ajouter de l’eau dĂ©minĂ©ralisĂ©e pour humidifier les diffĂ©rentes salles du nid (attention Ă  ne pas utiliser de l’eau en bouteille ou du robinet, le calcaire finirait par boucher les pores de la rĂ©serve). En fonction des besoins de votre espĂšce, de la tempĂ©rature et de l’humiditĂ© de votre logement, il faudra remplir ces rĂ©serves une ou plusieurs fois par semaine.

      Une fourmiliĂšre est constituĂ©e de 2 parties hygromĂ©triques : une zone humide (situĂ©e juste Ă  proximitĂ© de la rĂ©serve d’eau) et une zone sĂšche, sĂ©parĂ©es par un gradient hygromĂ©trique qui permet aux fourmis de choisir la zone qu’il leur convient. En tube de fondation, les fourmis rĂ©guleront elles-mĂȘmes l’hygromĂ©trie tant que la rĂ©serve d’eau ne sera pas sĂšche.

      On qualifie de xĂ©rophile les espĂšces de fourmis ne nĂ©cessitant pas une forte hygromĂ©trie dans leur nid tandis que l’on dit hydrophile les espĂšces en ayant besoin. En plus d’une hygromĂ©trie adaptĂ©e Ă  votre espĂšce, nous conseillons d’ajouter en complĂ©ment un abreuvoir d’eau dans l’aire de chasse de vos fourmis, comme mentionnĂ© dans le Chapitre III. Cela leur permettra non seulement d’aller se dĂ©saltĂ©rer en-cas de besoin, mais aussi d’avoir accĂšs Ă  de l’eau en cas d’oubli d’humidification.

      Un nid en pierre reconstituĂ©e avec les deux rĂ©serves d’eau Ă  gauche.

       

      TempĂ©rature : 

      Toutes les espĂšces de fourmis n’ont pas les mĂȘmes besoins thermiques. Certaines espĂšces vont demander un chauffage tandis que d’autres se satisferont de la tempĂ©rature ambiante d’une maison. Les espĂšces nĂ©cessitant d’ĂȘtre chauffĂ©es requiĂšrent du matĂ©riel de terrariophilie pour augmenter la tempĂ©rature du nid. Un tapis chauffant de 5 Ă  7 W fera parfaitement l’affaire il nĂ©cessitera cependant d’ĂȘtre couplĂ© Ă  un thermostat pour Ă©viter tout risque de surchauffe de vos fourmis.

      A la maniĂšre de l’humidification d’un nid, il vous faudra crĂ©er un gradient thermique dans le nid avec un point chaud et un point frais, Ă  tempĂ©rature ambiante. Par consĂ©quent nous recommandons de ne chauffer que la moitiĂ© du nid ou du tube.
      Attention à ne pas surchauffer et à vérifier réguliÚrement la température émise par votre dispositif de chauffage avec un thermomÚtre.

      Si la chaleur a un effet positif dans le dĂ©veloppement du couvain chez les espĂšces dites “thermophiles“, elle peut Ă©galement nuire Ă  la colonie si elle est trop importante.

      Une tapis chauffant 5W.


      La luminosité :
       

      Afin de stimuler l’activitĂ© de votre colonie et de permettre aux espĂšce endogĂšne de prĂ©parer leur diapause, il est conseillĂ© d’exposer l’aire de chasse (et non le nid) de vos protĂ©gĂ©es Ă  une lumiĂšre assez vive. Que cela soit par des ampoules ou rampe LED, ou en plaçant la colonie Ă  proximitĂ© d’une fenĂȘtre lumineuse (attention Ă  ne pas mettre le nid juste derriĂšre pour Ă©viter les coups de chaud). Il est en revanche fortement conseillĂ© de placer un carton opaque ou une feuille d’aluminium sur le nid ou le tube de fondation pour limiter le stress de la gyne, l’exposition prolongĂ©e aux UV du soleil Ă©tant d’ailleurs un facteur mutagĂšne pour le couvain d’une colonie.

       

      L’aire de chasse (ou « ADC »):

      Il s’agit de la partie de l’installation qui va occuper autant, si ce n’est d’avantage, de place que le nid. Il s’agit simplement d’une grande cuve, pouvant ĂȘtre un ancien aquarium comme une boĂźte de rangement ouverte, dans laquelle les ouvriĂšres pourront se balader en sortant du nid. Elles iront y fourrager, c’est Ă  dire qu’elles parcoureront ce vaste monde Ă  la recherche de nourriture. Vous placerez dedans vos abreuvoirs, vos gamelles d’insectes, ainsi que tout Ă©lĂ©ment dĂ©coratif que vous souhaitez. Le nid peut ĂȘtre placĂ© directement dans l’aire de chasse, ou ĂȘtre reliĂ©e Ă  elle via un tuyau de raccord. Nous vous conseillons, surtout dans le cas des ADC en plastique, de couler une dalle de plĂątre au fond, afin d’augmenter l’adhĂ©rence et que les ouvriĂšres puissent se dĂ©placer sans gĂšne. L’air de chasse devra ĂȘtre ouvert pour simuler un environnement extĂ©rieur, bien diffĂ©renciĂ© du nid (auquel cas, les ouvriĂšres pourraient dĂ©cider de dĂ©mĂ©nager le couvain ou la gyne dedans…). Les bords internes de l’ADC devront nĂ©cessairement comporter une bande d’anti Ă©vasion, empĂȘchant votre colonie de sortir conquĂ©rir votre maison. Pour la plupart des espĂšces, de l’huile de paraffine ou de l’huile vĂ©gĂ©tale Ă©talĂ©e fera l’affaire. Pour certaines espĂšces rĂ©calcitrantes, du Talcool (un mĂ©lange de talc, d’alcool sans additifs) devra ĂȘtre utilisĂ©. Quelques rares espĂšces particuliĂšrement acrobatiques devront ĂȘtre retenues avec du TĂ©flon (bien que nous n’encourageons pas cette mĂ©thode, de part la conception extrĂȘmement polluante de ce composĂ© et Ă  cause de ses impacts suspectĂ©s sur la santĂ©). À dĂ©faut, il peut ĂȘtre envisagĂ© de fermer l’aire de chasse avec un couvercle grillagĂ©, et de créé des douves d’eau (notamment en plaçant l’aire de chasse dans une cuve plus grande).

      La mise en nid :

      Une fois votre fondation devenue populeuse, il faudra songer Ă  la transfĂ©rer dans un nid que vous aurez prĂ©parer pour l’occasion. Les fourmis n’ayant pas toutes les mĂȘmes besoins, elles ne nĂ©cessitent donc pas la mĂȘme installation. La conception d’une installation adaptĂ©e est une tĂąche complexe que nous n’aborderons pas dans ce guide. Nous vous invitons donc Ă  lire les guides de construction de nids , ainsi que nos fiches d’Ă©levage pour vous aider dans votre dĂ©marche.

      La diapause :

      La diapause est un Ă©quivalent de l’hibernation chez les insectes. NĂ©cessaire chez les fourmis de climat tempĂ©rĂ©, elle induit des modifications durables dans le comportement, l’espĂ©rance de vie et le dĂ©veloppement d’une colonie. Ce sujet mĂ©ritait son propre guide, nous vous renvoyons donc sur la page associĂ©e.

      Sources :

      Photographie de couverture du guide : Triturus.
      RĂ©daction : Chamallow_Sauvage, adaptĂ© d’aprĂšs l’ancien guide d’Antariums v4 (BBphok, Claviger, Jojo, MahĂ©, One_Ants, Ookami, Raloufifa Triturus)

      Copyright Antariums v5Âź 08/2025
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