Fiche d'élevage : Messor bouvieri

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Photographie couverture de la page Europe, recadrée pour une meilleure intégration.
1) CLASSIFICATION ET SIGNIFICATION :
Famille : Formicidae
Sous-famille : Myrmicinae
Tribu : Stenammini
Genre : Messor
Espèce : Messor bouvieri
Taxonomiste et année de description : Jean Bondroit en 1918, à partir de spécimens provenant des Pyrénées-Orientales.
Noms vernaculaires : Comme beaucoup d’espèces du genre, elle peut être appelée « fourmi moissonneuse ».
Synonymes et anciens noms utilisés : Aucun. Elle fut cependant parfois mentionnée sous le nom de Messor sanctus, avec laquelle elle fut confondue.
Étymologie genre : Du latin messis, « moisson ».
Étymologie espèce : Nommée d’après le professeur E.-L. Bouvier, qui aida financièrement Bondroit dans ses travaux sur les fourmis.
2) MORPHOLOGIE ET IDENTIFICATION :
TAILLE OUVRIÈRES : 4 à 8,5 mm

TAILLE GYNE : 10,5 à 13 mm

Romain
TAILLE MÂLE : 7 à 8 mm

Morphisme : Un fort polymorphisme est présent au sein des colonies matures ; on peut séparer les ouvrières en minors, médias et majors. Ces dernières sont reconnaissables à leur grande tête, dont les fortes mandibules sont utiles au décorticage des graines. Il peut y avoir de grandes variations de taille pour chacune des sous-castes, et tous les intermédiaires sont présents, c’est pourquoi le polymophisme de cette espèce est dit « continu ». Il est cependant moins prononcé que chez d’autres Messor.
Identification : La présence d’un psammophore (un ensemble de longs poils recourbés sous la tête) suffit à séparer cette espèce de toutes les autres Messor de France continentale (qui peuvent également avoir de longs poils sous la tête, mais jamais aussi nettement recourbés).
Description et particularités physiques : Les ouvrières sont noires brillantes avec une pilosité faible. Là où les minors sont frêles, les majors présentent une grosse tête, qui reste cependant bien moins disproportionnée que chez d’autres Messor.
Elles sont capables de replier leur abdomen sous le thorax, posture assez fréquente chez le genre Messor.
3) BIOLOGIE :
Description du biotope : Cette espèce peut être rencontrée dans les biotopes ouverts, secs et ensoleillées, tels que les garrigues méditerranéennes. Elle est parfois présente près des littoraux, et dépasse rarement 1 000 mètres d’altitude.

Garrigue autour de Viol-Le-Fort, Hérault, sud de la France, photo par isasza
Nidification : Elle nidifie à même le sol dans des lieux dégagés, et le nid peut atteindre quelques mètres de profondeur. Ses entrées sont souvent plus petites et discrètes que chez d’autres Messor, bien que des monticule de terre excavée ou de détritus puissent parfois les surmonter.


Démographie : Les colonies dépassent plusieurs milliers d’ouvrières.
Particularités comportementales : Là où elle est présente, cette espèce se fait souvent plus discrète que les autres Messor françaises. Cela ne l’empêche pas de fourrager tout aussi activement au sol, où les ouvrières suivent en grand nombre des pistes pouvant dépasser les 20 mètres de long, mais ne s’étendant le plus souvent que sur quelques mètres. Au bout de ces « autoroutes de fourmis », les ouvrières se dispersent et cherchent individuellement des graines tombées au sol, en ne remontant que rarement dans la végétation pour en prélever directement sur les plantes. Parfois, elles déterrent même des graines enfouies.
Au printemps et en automne, elles sont principalement actives en pleine journée. En été, en revanche, elles fourragent avant tout le matin et le soir, et toute activité cesse lorsque la température du sol dépasse 45 °C.
Les ouvrières ramènent les graines directement dans le nid, ou à proximité de l’entrée avant qu’une autre prenne le relai. Ces graines sont amassées en été afin de constituer de grandes réserves stockées dans des salles spécialisées, les greniers. Ceux-ci sont gérés pour éviter la germination des graines et les moisissures. Avec les graines, les ouvrières fabriquent ensuite un « pain de fourmis » qu’elles confectionnent en les mastiquant jusqu’à en faire une pâte. Il sera consommé par tous les membres de la colonie, y compris les larves.
Cette espèce est capable de striduler, bien que le crissement ainsi produit ne soit pas distinct pour l’oreille humaine.
Alimentation : Ces fourmis sont essentiellement granivores. Elles récoltent toutes sortes de graines dans leur environnement, avec une préférence pour celles de plus d’1 mg. Plus occasionnellement, elles peuvent consommer d’autres débris végétaux, et plus rarement animaux (cadavres d’invertébrés, excréments de vertébrés…).
Elles n’ont pas de jabot social, et ne pratiquent pas de trophallaxie ; de fait, elles sont incapables de ramener efficacement de la nourriture liquide au nid.
Essaimage : Les essaimages se font en automne, de début septembre à fin novembre avec un pic d’envol vers mi-octobre. Les gynes font des allers-retours durant l’après-midi, et, une fois le moment venu, elles s’envolent avec les mâles pour effectuer le vol nuptial.
Gynie : Cette espèce semble monogyne.
Fondation : Indépendante et claustrale ; la gyne tiendra sur ses réserves jusqu’à l’émergence des premières ouvrières, qui iront chercher les premières graines. En général, la gyne commence à pondre après l’hiver, et la fondation a donc lieu au printemps.
Cycle de développement : Cette espèce est exogène-hétérodynamique ; sa diapause est déclenchée par les conditions extérieures telles que la baisse des températures à l’automne.

4) RÉPARTITION :
Elle se situe sur le pourtour Nord-Ouest du bassin méditerranéen, principalement dans le Sud du Portugal et de l’Espagne, mais également dans le Sud de la France et en Italie.
En France, elle est présente sur le pourtour méditerranéen, mais est absente de Corse.
5) ÉLEVAGE :
Température de maintien : Cette espèce tolèrera une température d’élevage de 22 °C à 29 °C, bien que la plage de 25 °C à 29°C soit idéale.
Hygrométrie : 20 à 50% de la surface du nid pourra être humidifiée.
Installation : Après une fondation classique en tube à essai, cette espèce pourra se contenter de tout type de nid résistant à leurs mandibules. En effet, Messor bouvieri est capable de creuser les matériaux trop friables ; de fait, les nids en plâtre et en PLA seront à éviter, et ceux en béton cellulaire devront être blindées, par exemple avec du plâtre résiné, du mortier, du mortier colle ou encore du ciment.
Le nid devra avoir des profondeurs de salles suffisantes, d’environ un centimètre au minimum, afin d’offrir suffisamment de place pour la confection du pain de fourmis. En effet, afin de le fabriquer, les ouvrières prennent généralement appui sur les hauteurs et gardent la tête en bas afin de mastiquer les graines.

Foreuse ? : Oui, il faudra veiller à ce que le nid soit blindé.
Diapause : La diapause est obligatoire pour Messor bouvieri, et devra durer environ 3 à 4 mois entre 6 °C et 10 °C. Il sera inutile de les nourrir durant cette période, leur réserve de graine étant suffisante pendant ce temps.
Fondation : Claustrale ; la reine placée dans un tube à essai avec une réserve d’eau n’aura pas besoin d’être nourrie jusqu’à l’émergence des premières ouvrières. La fondation n’aura généralement lieu qu’après une première diapause.
A l’arrivée des ouvrières, une aire de chasse peut être raccordée au tube. Cette simple installation sera suffisante jusqu’à ce que le tube humide soit rempli d’ouvrières, généralement aux alentours de 50 à 100 individus, après quoi il sera possible de leur proposer un premier petit nid.
A la fin de la première année de développement, les colonies compteront souvent entre 50 et 100 ouvrières. Les années suivantes, le développement devient exponentiel, et la démographie peut ainsi dépasser le millier d’ouvrières lors de la troisième ou la quatrième année.

Alimentation en élevage : Étant essentiellement granivores, vous devrez leur fournir des graines comme base de l’alimentation. Elles devront être de petite taille pour les jeunes, et de toutes tailles une fois les premières médias et majors apparues dans la colonie. Il est conseillé de varier autant que possible les graines que vous proposez à votre colonie, d’abord afin de vous assurer que leur alimentation soit complète (les nutriments variant en fonction des graines) mais aussi parce que chaque colonie a ses préférences, qui peuvent changer avec le temps.
Beaucoup de graines sont acceptées (quinoa, blé, lin, alpiste, niger, navette, avoine, chanvre, lin…) ; de ce fait, vous pouvez leur proposer par exemple des mélanges de graines pour canaris.
Vous pouvez aussi récolter quelques graines dans la nature, comme celles de pissenlits, qui sont très appréciées. Veillez toutefois à bien choisir l’emplacement de vos récoltes, en évitant par exemple les bords de routes fréquentées, les villes ou d’autres environnements potentiellement pollués.
Il sera également important de leur apporter occasionnellement des protéines par le biais d’insectes fraîchement tués.
Enfin, de manière facultative, des aliments sucrés peuvent occasionnellement être proposés à la colonie. En l’absence de trophallaxie, le pseudo-miellat ne profitera qu’aux fourrageuses, mais de petits morceaux de fruits pourront également être proposés et seront quant à eux ramenés au nid.
Difficulté d’élevage : Facile. Comme d’autres Messor, cette espèce sera simple à faire prospérer, tant que vous prenez en compte la grande taille qu’atteignent les colonies sur le long terme et l’espace qu’elles peuvent demander en conséquence.
Sources et Crédits :
Publications myrmécologiques :
- Bernard, F. 1967. Faune de l’Europe et du Bassin Méditerranéen. 3. Les fourmis (Hymenoptera Formicidae) d’Europe occidentale et septentrionale. Paris: Masson, 411 pp. (https://www.antcat.org/references/122660)
- Bondroit, J. 1918. Les fourmis de France et de Belgique. Annales de la Société Entomologique de France 87:1-174. (https://www.antcat.org/references/122872)
- Cerda, X.; Retana, J. 1994, Food exploitation patterns of two sympatric seed-harvesting ants Messor bouvieri (Bond.) and Messor capitatus (Latr.) (Hym., Formicidae) from Spain. Journal of Applied Entomology, 117: 268-277. https://doi.org/10.1111/j.1439-0418.1994.tb00735.x
- Willott, J.; Compton, S.; Incoll, L. 2000. Foraging, food selection and worker size in the seed harvesting ant Messor bouvieri. Oecologia. 125. 35-44. 10.1007/PL00008889. (https://www.jstor.org/stable/pdf/4222743.pdf?casa_token=rwA6dDOKfeEAAAAA:s1SFNE5Pn5HsD10uLcW33Ojk17RSUJD7US3lrPIoeyL3LgLLOzTY9MItjNmfSa-z3yG4bqKdkHxsW3mXO-0vcw5HAQ7srlJmf6nJvkGhhTVSVBQqJRI)
Sites Internet :
- Antcat.org
- Antwiki.org
- Antmaps.org
- Antweb.org
- AntArea.fr
- Inaturalist.org
- Wiktionnaire (https://fr.wiktionary.org/wiki/Wiktionnaire:Page_d%E2%80%99accueil)
Nos éleveurs : One Ants, Romain, Triturus…