1) CLASSIFICATION ET SIGNIFICATION :
Famille : Formicidae
Sous-famille : Paraponerinae
Tribu : Paraponerini
Genre : Paraponera
Espèce : Paraponera clavata
Taxonomiste et année de description : Fabricius, 1775 (sous le nom de Formica clavata).
Noms vernaculaires : « Bullet ant » (Anglais), « fourmi 24 heures » ou « fourmi balle de fusil ».
Synonymes et anciens noms utilisés : Les taxons Paraponera aculeata et Paraponera tarsalis sont considérés comme synonymes de P. clavata. Aucun d’eux n’est encore utilisé.
Étymologie genre : Du préfixe grec ancien παρά, « à côté de », et le nom du genre Ponera (venant lui-même du grec ancien πονηρός, « méchant, mauvais, misérable, laborieux »), soit « proche des Ponera » ; en effet, cette fourmi était classée comme Ponera clavata avant que Smith lui décrive un genre à part en 1858.
Étymologie espèce : Du latin clavatus, « garni de piquants », probablement en référence aux deux épines présentes sur le pronotum des ouvrières.
2) MORPHOLOGIE ET IDENTIFICATION :
TAILLE OUVRIÈRES : 16 à 25 mm

TAILLE GYNE : 25 à 30 mm

TAILLE MÂLE : 14 à 20 mm ?

Morphisme : Monomorphe ; bien que de légères variations de taille soient visibles entre les ouvrières d’une même colonie, elles restent insuffisantes pour différencier plusieurs sous-castes d’ouvrières.
Identification : La silhouette de cette espèce, seule représentante actuelle décrite de sa sous-famille, suffira pour la reconnaître. En cas de doute, toutefois, son pétiole formant un angle aigu à l’avant permettra de la séparer des autres fourmis de taille comparable.
Description et particularités physiques : Cette espèce de très grande taille présente une apparence extravagante, baroque et unique parmi les fourmis. La couleur varie du rouge bordeaux au brun foncé et la pilosité est abondante. La tête présente de nombreuses stries et les yeux sont de grande taille. Les reines sont semblables aux ouvrières et ne sont pas beaucoup plus grandes, mais pourront néanmoins classiquement en être séparées par un mesosoma (thorax) plus volumineux, des ailes bien développées et trois ocelles sur le front. Les mâles sont similaires aux reines, à l’exception de leur tête très réduite. Les œufs fertiles sont oranges, là où les œufs trophiques sont plus petits et blancs.
3) BIOLOGIE :
Description du biotope : Paraponera clavata est une espèce de basse altitude (moins de 1 000 mètres), typique des grands espaces naturels néotropicaux. Elle est surtout commune dans le sous-bois des forêts humides primaires et secondaires du bassin Amazonien et de l’Atlantique.

Nidification : Les nids sont le plus souvent terricoles, mais presque systématiquement établis à proximité directe d’un grand arbre (souvent du côté bas sur les terrains en pente).
Parfois, l’entrée du nid forme un tube vertical remontant sur le tronc de l’arbre. Une donnée d’excavation d’un nid (comportant 1 326 ouvrières) donne une profondeur de 62 centimètres pour 43 chambres, chacune de 13 à 16 mm de hauteur et 5 à 10 cm de diamètre.
En outre, dans plus de 5 % des cas, des nids établis dans des accumulations d’humus arboricoles peuvent également être construits. Les colonies peuvent être polydomes.

Démographie : Les nids peuvent atteindre 3 000 ouvrières, mais, compte tenu de la polydomie de l’espèce, ce chiffre est peut-être inférieur à la démographie maximale réelle des colonies.
Particularités comportementales : Les ouvrières fourragent surtout dans les arbres jusqu’à la canopée. Le fourragement est généralement effectué en solitaire, bien que des pistes phéromonales puissent relier les sources de nourriture abondantes au nid, et que du tandem running puisse occasionnellement être effectué. De nuit, les ouvrières sont plus nombreuses à fourrager.
Paraponera clavata est connue pour sa piqûre très douloureuse pour les humains, parfois considérée comme la pire parmi les fourmis, classée à 4 sur l’échelle de douleur de Schmidt (c’est-à-dire au plus haut). Même en-dehors d’une réaction allergique, cette piqûre peut parfois entraîner de la fièvre, des frissons, des sueurs froides, des nausées, des vomissements et de l’arythmie cardiaque. Cependant, les ouvrières restent peu agressives tant que leur nid n’est pas dérangé. Lorsqu’elles sont dérangées, les ouvrières peuvent striduler et relâcher une odeur musquée.
Alimentation : Cette espèce consomme des substances sucrées telles que du nectar, chasse de petits arthropodes et récolte des débris végétaux. En l’absence de trophallaxie, toute la nourriture est directement ramenée au nid (y compris les liquides, transportés sous forme de goutte entre les mandibules des ouvrières). Les larves se nourrissent directement sur les proies, ou bien des œufs trophiques pondus par les ouvrières.
Essaimage : Les sexués se reproduisent durant une grande partie de l’année, globalement durant les saisons pluvieuses en fonction des régions. La reproduction s’effectuerait selon le female calling syndrome : sans que de véritables essaimages ponctuels aient lieu, les gynes attireraient simplement les mâles à elles par leurs phéromones. Après leur dispersion, les mâles peuvent continuer à se nourrir et vivre jusqu’à 116 jours à l’extérieur du nid.
Gynie : Les colonies semblent monogynes.
Fondation : Indépendante et semi-claustrale ; après l’accouplement, les reines s’aménagent une loge qu’elles quittent régulièrement afin de se nourrir durant le développement de la première génération d’ouvrières.
Cycle de développement : Homodynamique ; les colonies sont susceptibles de se développer tout au long de l’année.
4) RÉPARTITION :
Cette espèce est répartie dans une très large partie de l’Amérique tropicale, du Honduras jusqu’au Sud du Brésil.
5) ÉLEVAGE :
Température de maintien : Un gradient thermique entre 22 °C et 25 °C pourra être réalisé. Veillez cependant à adapter les températures d’élevage aux conditions climatiques de la localité d’origine de votre colonie.
Hygrométrie : Entre 40 % et 60 % de la surface du nid pourra être humidifiée.
Installation : Afin de s’approcher autant que possible de ce que les colonies privilégient in natura (à savoir nidifier dans la terre contre les grands arbres), il sera possible de les installer dans un grand terrarium planté où vous disposerez une souche dont les racines s’enfoncent dans le substrat.
À défaut (et d’autant plus qu’une colonie mature demanderait un terrarium gigantesque), il sera possible de les installer dans un nid plus classique (par exemple en béton cellulaire ou en pierre reconstituée) tant que vous veillez à ce que les salles soient de dimensions adaptées et que l’ensemble de l’installation soit tapissé de substrat. Une microfaune abondante (qui pourra notamment être constituée de collemboles) devra en outre y être établie, afin de participer au nettoyage des déchets de la colonie et ainsi éviter moisissures et acariens.
Leur proposer des morceaux de feuilles mortes pourra aussi être utile ; en effet, il semblerait que les larves en consomment occasionnellement, sans compter que cela facilitera la stabilisation de la microfaune.
Dans un cas comme dans l’autre, pour cette espèce fourrageant principalement dans les arbres in natura, n’hésitez pas à leur proposer beaucoup de hauteur et de relief dans l’aire de fourragement.
Enfin, il convient de noter que cette espèce monte très bien aux parois lisses, et une barrière anti-évasion ainsi qu’un couvercle (qui sera en outre essentiel pour maintenir une humidité ambiante suffisante) seront de fait indispensables.


Foreuse ? : Non.
Diapause : Aucune véritable diapause ne sera nécessaire. En fonction du climat de la
localité d’origine de votre colonie, reproduire les éventuelles variations saisonnières de
température pourra cependant être préférable.
Fondation : Semi-claustrale ; il sera nécessaire de nourrir la ou les gynes tout au long de la fondation. Elle sera particulièrement longue (pouvant durer 6 mois), difficile et aléatoire.
Les pléométroses sont à privilégier afin d’augmenter son taux de réussite. Les paramètres d’élevage devront être particulièrement stables (la moindre erreur, notamment en termes d’hygrométrie, pouvant signifier la mort du couvain et donc la perte de plusieurs mois de développement), et il sera essentiel de stresser les reines aussi peu que possible.
Pendant la fondation, l’installation pourra consister en une boîte tapissée d’une fine couche de substrat, avec comme nid un module assez large (par exemple en béton cellulaire, ou formé par un couvercle de boîte de pétri retourné sur le substrat). Veillez à ce que le nid puisse être ouvert à tout moment en cas de besoin d’y intervenir. Là encore, une microfaune abondante sera en outre indispensable.
Il peut arriver que les gynes en fondation ne nourrissent pas leurs larves, auquel cas il sera possible de les isoler et de les nourrir deux à trois fois par semaine avec des morceaux d’insectes fraîchement tués. Lorsque les larves matures commenceront à tisser leur cocon, il faudra également déposer quelques petits morceaux de substrat sur elles.
De la même manière, si les gynes n’ouvrent pas un cocon après plus de 55 à 60 jours, vous pourrez le faire vous-mêmes, par exemple avec un petit morceau de scotch.
Enfin, si la reine échoue à élever son couvain de façon répétée, la booster avec des cocons d’ouvrières d’une autre colonie pourra être une option de dernier recours.

Alimentation en élevage : Il sera nécessaire d’à la fois proposer à la colonie de la nourriture sucrée (notamment du pseudo-miellat) et des insectes fraîchement tués.
Reproduction en captivité : Puisque Paraponera clavata semble avoir pour stratégie de reproduction le female calling, il est très probable que des accouplements au sol puissent être réalisés en élevage. Cependant, cela nécessiterait tout d’abord de maintenir plusieurs colonies de l’espèce suffisamment peuplées pour produire des sexués, ce qui demanderait de déployer des moyens considérables, sans compter qu’il est déjà rare de voir des fondations de l’espèce se développer correctement en élevage.
Détails à ajouter : Compte tenu de la grande taille de ces fourmis et de la démographie élevée que les colonies peuvent atteindre, cette espèce pourra être très encombrante à terme, aussi bien en termes de place que de nourriture à lui fournir. Sa redoutable piqûre sera également à prendre en compte. Bien que Paraponera clavata reste assez docile et qu’il sera relativement aisé d’éviter les piqûres en temps normal, les ouvrières des grandes colonies se montreront plus agressive lorsque leur nid est ouvert, et les déménagements pourront ainsi se révéler difficiles à terme. A noter que le développement serait d’environ 4 mois à 25 °C.
Difficulté d’élevage : Très difficile, compte tenu de la fondation longue et ardue, et des besoins gargantuesques des grandes colonies
Sources et Crédits :
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